Après avoir (enfin) terrassé le seigneur des anneaux au Mans après une longue traque, la marque au lion envoie son coupé « hors série » RCZ à l’assaut de l’Audi TT. On l’a longuement essayée –et copieusement essorée !- Et vous savez quoi ? C’est que du bonheur ! Quand Peugeot ose, ça cause…
Alors, ce petit lionceau sera-il le saigneur des agneaux ? A voir… C’est bien connu : il ne faut jamais vendre la peau du loup (Piëch) avant de l’avoir trucidé. D’autres s’y sont cassé les crocs. Mais le défi ne manque pas de panache…
Par Jean-Michel Cravy
RCZ… Peugeot en avait raté, des rendez-vous, avec lui-même et avec ses aficionados, tout prêts à plonger dans une relation fusionnelle avec la marque au lion, qui avait apposé, il y longtemps déjà, sa marque sur la plus haute compétition automobile, en rallye beaucoup (avec la 205 T16), en rallyes-raids aussi, en F1 un peu, mais surtout aux 24 heures du Mans, avec la fameuse 905… Prototype Oxia, concept car RC, pour ne citer que quelques rendez-vous manqués, par frilosité et pusillanimité du staff de l’époque, étaient restés hélas à l’état de rêves inachevés….
Mais cette fois, Peugeot n’a pas manqué à ses devoirs. Peugeot a osé. Cette fois ! Osé passer d’un concept car de salon toujours alléchant sur la moquette d’un salon à une vraie auto commercialisée, que les amateurs pourront acquérir, et au volant de laquelle ils pourront prendre du plaisir, tout simplement… C’était si compliqué ?
Fallait juste oser… Sous la forme d’un « hors série », d’accord (pour reprendre la pudique terminologie officielle), mais qui en appellera d’autres, si la réponse du public est au rendez-vous. Mais qui en douterait ?
C’est vrai que de nouveau Peugeot a le vent en poupe. Après une longue quête, la vieille marque de Sochaux (qui fête cette année ses 200 ans d’activité, entamée avec des outils, des vélos et des… moulins à café !), est enfin parvenue à terrasser l’ogre d’Ingolstadt, qui depuis une décennie tenait les 24 Heures du Mans sous sa coupe. De là à avoir envie de lui tailler des croupières sur la route, il n’y avait qu’un pas…
Un concept car sur la route !
Du concept car 308 RCZ du salon de Francfort 2007, crée par l’Allemand Boris Reinmöller à la RCZ qui prend la route aujourd’hui, il n’y a de différence que… la moquette du salon, et les rétroviseurs, à peine retouchés ! Bel, et rare exploit que de faire descendre dans la rue un fantasme de designer sans être obligé de le trahir profondément…
Alors, oui, la Peugeot RCZ attaque frontalement l’Audi TT. Telle est sa mission, clairement identifiée. De là à dire que ces deux coupés compacts se ressemblent, il y a loin. Autant la TT arbore une allure râblée, épaisse, rassurante, avec sa ligne ponton et sa ceinture de caisse haute, autant sa jeune rivale française fait preuve d’une sveltesse d’athlète de haut niveau, « au plus près du corps », un peu à l’image de sa grande sœur, la 908 de compétition.
Fine, basse, élancée, avec une ligne de cabine cintrée, des reins cambrés ornés d’un aileron escamotable et des ailes rebondies qui musclent la silhouette et suggèrent la performance et l’agressivité : la RCZ donne envie, même à l’arrêt, déjà, et multiplie les références provocatrices.
Si, de face, la RCZ arbore l’identité familière de la marque (avec une large bouche, surmontée d’un lion redessiné et rajeuni, qu’on retrouvera dorénavant sur tous les futurs modèles), vu d’arrière, elle prend des accents de « baby » Porsche Boxster, en plus fluet toutefois. Les arches de toit en aluminium ne vous disent rien ? Elles ne vous font pas penser au fameux « Space Frame » qui fut longtemps l’orgueil d’une certaine marque aux anneaux ? En tout cas, elles structurent un toit à double bossage qui rappelle furieusement le « double bubble » inventé en d’autres temps par le carrossier Zagato, prolongé par une lunette arrière elle aussi d’un dessin très sophistiqué, qui a poussé à ses limites le savoir faire du verrier Saint Gobain. Le résultat est absolument superbe, pour un « hors série » fabriquée -hors grande série- chez Magna (Ex Steyr Püch), en Autriche.
Elle se prête à merveille à la personnalisation
A l’intérieur, l’ambiance est sportive à souhait, avec des sièges enveloppants et maintenant bien le corps, une planche de bord simple et nette (on aurait aimé, soit dit en passant, qu’elle s’inspire plus de celle de la 3008 que de celle de la 308).
L’ensemble dégage une impression fort sympathique, bien aidée, il faut le dire, par l’option « cuir intégral » gainant même le tableau de bord, tarifée 3 700 €, qui équipait tous les modèles mis à notre disposition, de sorte que nous n’avons pas pu juger d’une RCZ « de base »… A ce stade, il faut préciser que la RCZ n’est proposée qu’en un seul et unique niveau de finition, à charge pour l’acquéreur de piocher dans un gros catalogue d’options pour personnaliser sa voiture à sa convenance, on y reviendra plus en détail…
Terminons le tour du propriétaire en constatant que si la RCZ s’affiche comme une 2+2, c’est bien le cas : les minuscules places arrière ne peuvent servir qu’en dépannage sur de très courts trajets. En revanche, leurs dossiers se rabattent individuellement pour augmenter la capacité du coffre qui est loin d’être négligeable, puisqu’elle peut évoluer de 320 à 640 dm3. Une volonté de se montrer serviable au quotidien fort louable.
Moteurs : à chacun selon ses besoins
Bon maintenant, assez rigolé, passons aux choses sérieuses ! Les mécaniques d’abord. Dans un premier temps, la RCZ est commercialisée avec un moteur essence, un 1.6 THP de 156 chevaux (27 400 €), et un diesel, le 2.0 HDI 163 chevaux (29 900 €). Et au mois de juin sera introduite (pour 30 000 € environ) une nouvelle motorisation, un 1.6 THP toujours (injection directe, levée variable des soupapes, turbocompresseur), mais porté à 200 chevaux cette fois, par les soins des motoristes maison, sans recourir à ceux de BMW, qui avaient conçu le moteur pour les deux firmes.
Ce sont ces deux dernières modèles que nous avons longuement essayés, qui possèdent chacun leur personnalité propre. Typée relativement « soft » pour le HDI, avec un châssis assez souple et des roues de 18 pouces. Typée plus « sport » pour le THP 200 ch, avec un châssis plus ferme, des freins un peu plus gros, une barre anti-rapprochement inférieure pour assurer un meilleur guidage du train avant, des jantes de 19 pouces, un volant plus petit et un levier de vitesses plus court (le tout étant regroupé dans un Pack Sport, disponible pour le HDI, moyennant 350 €), sans oublier 70 kilos de moins, qui pèsent sur le nez de la version mazout…
Châssis : à chacun selon ses envies
On commence par laquelle ? La plus affûtée ? Banco. Allez, en route ! Dès les premiers tours de roues, on sent, instantanément, que les ingénieurs châssis s’en sont donné à cœur joie pour prouver à tous leur légendaire savoir-faire, sans trop de contrainte ni compromis, comme c’est souvent le cas. Au programme : rigueur, précision, netteté, efficacité, vivacité, homogénéité. Et, conséquence directe : un vrai plaisir de pilotage, comme on n’en connaît plus guère de nos jours… Que du bonheur ! L’amateur pourra vraiment « attaquer » sans arrière-pensée, comme nous l’avons fait sans mesure sur un parcours sinueux et accidenté à souhait au pays Basque espagnol.
Un bémol tout de même : cette THP 200 est dotée d’une « boîte à musique » qui amplifie artificiellement le bruit moteur. Rigolo cinq minutes, puis très vite lassant, surtout dans les très hauts régimes, qui peuvent grimper jusqu’à 6 800 tours. Dommage qu’on ne puisse pas couper le son… Et puis on émettra un petit doute vis-à-vis des performances annoncées (1000 mètres départ arrêté en 27,5 secondes, vitesse de pointe de 237 km/h) que nous n’avons pas pu contrôler avec la rigueur nécessaire, mais qui nous ont semblé tout de même un rien optimistes. A vérifier d’ici sa commercialisation, en juin prochain.
Un diesel… de course !
Et puis la HDI 163 chevaux. Autant le dire tout de suite : elle ne nous a pas déçus, loin de là. D’abord le moteur est plus discret, plus reposant à la longue. Ensuite il fait preuve, lui, d’une belle pêche, d’un bel allant, qu’on ne lui connaissait pas sur des berlines ou monospaces forcément beaucoup plus lourds. Bien servi par sa boîte 6 rapports, il se prête très volontiers à une conduite véritablement sportive. Et entre nous, son couple est supérieur à celui du THP 200, et à régime comparable (4 000 tr/mn) il ne nous étonnerait pas qu’il délivre autant de puissance que le moteur essence, même turbocompressé lui aussi.
Alors certes, le châssis est un poil moins incisif, le nez se fait un peu plus lourd en entrée de courbe, le sous-virage est un peu plus marqué, qui déclanche l’ESP plus tôt.
Mais il suffit de le déconnecter (ce qui devient rare !) et de bien gérer la saturation du train avant pour obtenir des cadences véritablement élevées, que bien des rivales pourraient lui envier…
Au premier rang desquelles l’Audi TT, l’adversaire désignée. Sensiblement plus bourgeoise, sensiblement moins sportive, sensiblement plus chère aussi, à motorisation comparable. Pour exemple, une TT 2.0 TFSI de 200 chevaux est tarifée 36 540 €, et une 2.0 TDI de 170 ch (à quatre roues motrices il est vrai), 38 890 €. Une grosse différence qui devrait largement faire la différence… au profit de la française !
J.-M. C.
Fiche express Peugeot RCZ
Dimensions (L/l/h) : 4,28 m/1,95 m/1,36 m
Poids : 1297 kg (THP 200)/1370 kg (HDI 163)
Coffre : 320 à 640 dm3
Transmission : aux roues avant, boîte 6 manuelle
1.6 THP 200
Moteur : 4 cylindres 1 598 cm3
Puissance : 200 ch à 6 800 tr/mn
Couple : 275 Nm à 4 500 tr/mn
Vitesse maxi : 237 km/h
1000 m DA : 27,5 s
0 à 100 km/h : 7,5 s
Consommation mixte : 6,9 l/100
Emissions de CO2 : 159 g/km
Prix (estimé) : moins de 30 000 €
2.0 HDI FAP 163
Moteur : 4 cylindres 1 997 cm3
Puissance : 163 ch à 3 750 tr/mn
Couple : 340 Nm à 3 000 tr/mn
Vitesse maxi : 220 km/h
1000 m DA : 29,6 s
0 à 100 km/h : 8,2 s
Consommation mixte : 5,3 l/100
Emissions de CO2 : 139 g/km
Prix : 29 900 €
Options :
Peinture métallisée : 500 €
Navigation GPS/lecteur DVD : 2 000 €
Pack Confort (allumage automatique des feux, détecteur de pluie, radars de stationnement) : 500 €
Pack cuir (sièges cuir chauffants) : 1 800 €
Pack Premium (pack cuir, pack confort, sièges chauffants électriques) : 2 700 €
Pack cuir intégral (pack premium, cuir sur tableau de bord et contre-portes) : 3 700 €
Pack vision (pack confort, projecteurs xénon directionnels) : 900 €
Pack sport (série sur THP 200, volant petit diamètre, levier de vitesses court, jantes 19 pouces) : 350 €
La personnalisation s’étend aussi à un large choix de jantes, des étriers de freins noirs, des coques de rétroviseurs noires ou carbone, un toit carbone, et trois tonalités de couleurs des arches de toit.