30 mars 2009
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Christian Streiff chez PSA, Rick Wagoner chez GM : le week-end a été meurtrier sur les routes de la restructuration de l’industrie automobile…
Par Jean-Michel Cravy
Chez PSA-Peugeot-Citroën d’abord, le conseil de surveillance (à la tête duquel se trouve Thierry Peugeot, représentant de la famille Peugeot, principal actionnaire du groupe, à hauteur de 30% du capital, et près de 45% des droits de vote) a mis brutalement fin ce dimanche au mandat de président du directoire de Christian Streiff, en raison (dixit) « des difficultés exceptionnelles qu’affronte l’industrie automobile. ».
Une manière de mettre à pied celui qui avait tenté de résister à l’ingérence de l’Etat dans les affaires d’un groupe privé, alors même qu’il avait accepté de ce même Etat des subsides bienvenus (3 milliards d’euros pour le seul groupe PSA), mais sans en accepter la moindre contrepartie. Ni sur sa montée dans le capital du groupe, ni sur un quelconque engagement sur les questions de délocalisations des activités, ou la fermeture de sites en France…
Dans mon édito, rédigé en janvier dernier, au lancement d’autopanorama, j’avais déjà stigmatisé ceux qui ne voulaient pas comprendre que l’ère du laisser-aller ultralibéral était bel et bien terminée. Et que, toute idéologie politique mise à part (quoique… on voit aujourd’hui des ex-ultralibéraux abjurer leur foi ancienne pour se convertir, par la force des choses, à l’interventionniste étatique !), il était plus que temps de remettre de l’ordre dans des affaires qui ne concernent pas (plus) seulement les intérêts privés d’actionnaires, mais aussi, et surtout, les intérêts collectifs, ceux de la nation. Devenus prioritaires, en raison de la profonde crise économique et sociale qui fait actuellement des dégâts énormes, due essentiellement à un capitalisme sauvage et sans morale aucune.
Christian Streiff avait été recruté il y a deux ans à peine par PSA pour assainir les finances du groupe. Reçu comme l’homme miracle, tout ce qu’il avait trouvé comme élégante solution de management, ça avait été de décider la suppression de 18 000 emplois. 18 000 vies professionnelles et familiales saccagées. Sans compter les conséquentes induites dans le tissu économique et social : les commerçants, les PME, les activités de service, évidemment touchées de plein fouet par l’insolvabilité de ces travailleurs devenus chômeurs !
Cet édito, vieux de deux mois déjà, est plus que jamais d’actualité. Et nul ne regrettera le départ de quelqu’un qui n’a rien voulu comprendre de ce profond changement d’ère… On espère simplement qu’il ne touchera ni parachute doré, ni retraite chapeau, et qu’il connaîtra les joies de l’ANPE, comme tous ceux qu’il a jetés sur le trottoir…
L’intérim sera assuré par Roland Vardanega, membre du directoire, en attendant la prise de fonction effective du nouveau patron désigné, Philippe Warin, à compter du 1er juin prochain, le temps que celui-ci prenne les dossiers en mains. On espère simplement que le nouveau venu aura entendu le message, et saura prendre la mesure de la situation. Pas seulement celle des intérêts des actionnaires du groupe, stricto sensu, mais aussi ceux de la société dans laquelle il baigne, et dont il tire profit…
Pour Rick Wagoner, le désormais ex Chairman Executive de General Motors, les choses sont (un peu) différentes… Lui était à la tête depuis huit ans de ce qui fut pendant des décennies le numéro un automobile mondial. Et qui ne l’est plus ! Et qui est aujourd’hui au bord du dépôt de bilan, prêt à se mettre sous la protection de l’article 11 de la loi américaine des faillites…
C’est sous la pression directe de Barack Obama et de son administration qu’il a remis sa démission. Le Président des Etats-Unis, fort des 17,4 milliards de dollars déjà versés, lui reprochait de ne pas avoir suffisamment restructuré son groupe pour assurer sa pérennité, et mettait comme condition première la démission de Wagoner à une nouvelle tranche d’aide gouvernementale de l’ordre de 21,6 milliards, qui devrait être répartie, dans les heures qui viennent, entre GM et Chrysler, également très mal en point…
Comme quoi, quand les Etats prennent en charge la socialisation des pertes de groupes privés (qui ne se privent jamais de privatiser leurs bénéfices, quand il y en a) il est parfaitement légitime qu’ils pèsent sur leur gestion, et imposent les intérêts collectifs dont ils ont la charge. Il suffit qu’ils sachent taper du poing sur la table !
Wagoner, qui n’a pas su gérer une crise du groupe GM qui dure depuis plusieurs années déjà, et n’est pas seulement liée à la crise actuelle, est donc remplacé, avec effet immédiat, par Fritz Henderson, 50 ans, actuel directeur de l’exploitation du groupe, et ancien responsable financier de General Motors.